Gastronomie provençale

Quelque part en Provence, non loin de Manosque, sur la route qui grimpe vers Apt, une ancienne bergerie juchée à flanc de colline entre un champ de lavandes et un champ de blé avec des oliviers tout autour et les montagnes à perte de vue. Giono venait paraît-il, y acheter ses fromages en des temps fort éloignés et désormais c’est « Les Monges, Gîte et chambre d’hôtes » qu’on lit sur la pancarte placée en bordure de route. L’endroit a conservé quelque chose de sa destination première et sans être rudimentaire le confort y est sommaire, tout juste une petite piscine a été rajoutée pour tenir compte des exigences du voyageur des temps modernes.
Lorsque l’on arrive ici en début d’été, on descend par la route qui serpente jusqu’ à Manosque, on franchit le pont sur la Durance et l’on grimpe jusqu’au plateau de Valensole où chaque année, dans la première quinzaine de juillet, l’ocre orangé du plateau se pare du violet des lavandes en fleurs. Nul autre endroit sur terre n’évoque mieux Le chant du monde de Giono ; ici l’on se contente du temps qui passe, on lit un peu et un peu de tout, de la littérature, des dépliants, des magazines, le journal du coin ou pour une fois les notices de médicaments que l’on a jamais totalement lues. Les repas sont la plupart du temps frugaux et pris à la « bergerie », quelques belles tomates de pays fermes et gorgées du soleil d’ici, une belle huile d’olive douce et parfumée, du basilic, un melon et l’un de ces merveilleux fromages de Banon à la chair si crémeuse nichée dans leur enveloppe de feuilles de châtaignier.
Parfois on pousse un peu plus loin au marché de Fortcalquier où l’on achète des olives et de la tapenade, des melons, des aubergines, des poivrons, des courgettes après s’être arrêté au café Place des Cordeliers boire un café crème à moins que ce ne soit un pastis avant qu’on ne se régale d’un aïoli ou de pieds paquets arrosés d’un verre de rosé de Pierrevert. Certains jours nous voient plutôt cigales, d’autres, fourmis et l’on entreprend de visiter la montagne de Lure à moins que ce ne soit la faïencerie de Moustiers, les gorges du Verdon ou de filer …à Nice par le train des Pignes. Les fourmis déjeunent à la Bastide de Moustiers d’Alain Ducasse ou encore à la Bastide de Capelongue à Bonnieux du chef Edouard Loubet (merveilleuse pizza aux truffes) Les cigales restées à Manosque dînent au restaurant Dominique Bucaille, une adresse comme on les aime, pétrie de générosité et de talent où l’on est bien dans le jardin à la tombée de la nuit et où chaque préparation, de l’apéritif au dessert, est goûteuse, belle à regarder et régulièrement renouvelée sur une carte faisant place uniquement aux produits du marché.
Assurément notre meilleur souvenir gastronomique de l’été en Provence.